mardi 10 mars 2015

Comfortable Hate, Black Bomb A

C'est ça votre idée du confort ?




Que c'est rafraîchissant de voir que le metal français est encore debout. Que c'est rafraîchissant de voir que les têtes de proue du genre bougent encore, et pas seulement un orteil. C'est tout le corps qui se met en mouvement, c'est quasiment incontrôlé. Comme si un mafieux te tirait dans les pieds, pour s'amuser et que tu devais éviter les balles. Black Bomb A relance la mode du pogo dans ta propre tête, où les différentes personnalités se retrouvent, contre leur gré, prises dans un wall of death de malade. C'est clairement un album fait pour la scène, pour le bourrin. Pour l'amour du bourrin, tout simplement. Et on en attend pas moins de Black Bomb A.

From Chaos avait été ma première rencontre avec l'entité, peu avant de les voir en concert. Autant dire que je ne me suis pas laissé longtemps avant de découvrir le reste de la disco du groupe. Un mélange subtil de chant, de screams (pour Poun) et de growls viscéraux (pour Djag ou Arno). La baraque rythmique est solide, très solide, tenue par un RV en béton. On retrouve la même recette ici, avec un retour d'Arno au chant, une basse tenue par un Jacou de feu (comme quoi ça doit être Fetus qui bride toute la créativité des musiciens), qui se fera un plaisir de nous claquer deux trois plans béton, avec un son vraiment metalcore, avec les cordes qui claquent. C'est vraiment bon. C'est pas prétentieux et il a vraiment gagné en niveau (bon, en partant d'Ultra Vomit, on ne peut que gagner du niveau). Black Bomb A est toujours aussi violent.

Et des fois, au milieu du bordel ambiant, l'oeil de la tempête. Rise Up. La basse qui claque, elle est là. Elle poutre. C'est presque du Speech of Freedom. On se retrouve en 2004. C'est une claque dans la tête. C'est du metalcore pur, avec des passages chantés au milieu de morceaux en scream syncopés par une caisse claire en béton. Look at the Pain est pas loin, avec ses refrains chantés qui t'enfoncent leurs petits poings dans la tête.

Ensuite ? Ensuite, c'est la débandade et je réponds plus de rien. Rise Up marque clairement un changement d'état dans l'album. On passe du gros bourrin non-stop à des morceaux ambiancés, sublimes. Into the Void et sa guitare acoustique. J'ai l'impression d'entendre No1Noise, la version sublimée de No One Knows où Poun est assis et immobile. La voix rauque d'Arno est vraiment un gros plus. Limite, elle avait manqué. La dualité des voix est encore plus imposante sur On Fire. Sortir un single comme celui-là, c'est limite malsain. Bon, y'a pas eu beaucoup d'attente entre le single et l'album, mais quand même. "After all these years still alive / We are still angry". De toute façon, on sait très bien que le groupe a toujours bouffé la vie des deux côtés en en mettant partout. En quoi ça change ? Bah la puissance. La rythmique double grosse caisse/basse. Un gros coup de massue bien placé. C'est propre, ça démolit. What else ?

Le petit côté funk est pas mal, aussi. Notamment dans The Poison. On sent Poun dans son élément, à la croisée de plusieurs genres, comme il l'est dans le Bal des Enragés ou comme il l'a été dans Monroe est Morte. C'est frais, ça poutre. Bref, c'est Black Bomb A. Tears of Hate est un morceau, lui aussi, assez monumental. Je pense que c'est à ce genre de morceaux qu'on peut reconnaître qu'un groupe a gravi pas mal d'échelons. Même si on avait eu quelques ébauches avant, notamment avec Shauny Davidson sur le morceau Hell on Earth qui était un concentré de 8 minutes bouillantes avec une collision magistrale entre le metal signé BBA et une fin sur orbite, là où on attendait pas le groupe. Tears of Hate se pose là, mais à l'exact inverse, avec son début tout calme et sa fin canon, limite sur le même rythme et la même diction que Burn en son temps.

Surtout, sur cet album, on retrouve ce qui avait grandement fait défaut au précédent opus, c'est ce contraste si particulier des voix, un mashup tout à fait singulier que seul BBA sait amener de manière magistrale. Le contraste Shauney / Poun n'était pas spécialement marqué, il manquait du contraste. Autant dire qu'il revient en force. Une claque dans la tête. Et c'est tout ce qu'il faut.