samedi 25 octobre 2014

The Gray Chapter, Slipknot

L'hommage à Paul ne pouvait pas être plus clair



S'il y a bien un album que nous n'attendions plus, metalleux de tous bords qui n'osons l'avouer, c'est bien ce dernier Slipknot. Parce qu'on a beau avoir plus de 15 piges maintenant, un shot de Slipknot fait toujours cet effet revigorant, presque une catharsis de nos années noires. Mais ça, personne n'osera l'avouer. Parce que Slipknot, c'est pour les ados et qu'on bosse dans le service public maintenant, alors les cheveux longs et les baggys troués, c'est mort, tu vois. Et bon, faut dire ce qui est, l'avenir du Knot était grandement compromise depuis que Paul Gray s'est fait la belle et que Jordison se soit fait virer du groupe. Une couche s'est encore ajoutée quand Jim Root s'est barré de Stone Sour. Bref, tout ce tapage autour du groupe n'augurait rien du tout de bon et laissait présager un retour plus que mitigé, voire même bâclé, des Neuf Masqués.

Autant dire que je m'étais un peu trompé sur cet album. Les deux singles sortis soufflaient le chaud et le froid. The Devil in I promettait un Slipknot plus sur la piste de Stone Sour, plus mélodique et plus linéaire, alors que The Negative One promettait un Slipknot pure race. En mon for intérieur, j'avais cette pensée qui me soufflait que ça serait vraiment bien que ça ressemble à un Slipknot mâtiné de Stone Sour, un truc hybride détonnant et étonnant. Autant dire que j'ai été un peu déçu quand The Negative One, premier single est sorti. Trop bourrin, trop Slipknot post 1999. Alors, quand The Devil in I est sorti, je me suis dit que le mélange des deux genres pourrait donner un truc vraiment bien et vraiment original. Peu de morceaux lugubres, voire glauque, pour asseoir un peu plus l'ambiance qui émergeait des trailers que le groupe avait utilisé pour sa communication. On en retrouve un peu dans Be Prepared for Hell (que j'aurais bien vu en introduction à la place de XIX, du coup)

Et ça a été le cas. Très clairement, cet album repose sur l'ambivalence de chaque période. Les morceaux durs, avec un Sid Wilson en exergue, comme sur Custer ou Nomadic. Dur, froid, distant. Depuis que j'ai découvert Slipknot, en 2009, ma préférence va vers des morceaux plutôt longs, plutôt malsains, comme Gehenna, comme ici avec le morceau qui clôture ce Chapter V, If Rain is Whar You Want, avec une intro en arpèges et en percussion, qui fait clairement monter la pression. D'autres morceaux sont plus dans la veine d'All Hope is Gone, plus mélodiques, moins bourrins, comme Killpop ou Goodbye. Ces morceaux s'inscrivent dans une partition d'époque à proprement parler. Un genre hybride entre Stone Sour et Slipknot, à la limite du StoneKnot (ou du SlipSour si vous voulez). C'est clairement ce qui ressort de cet album. Slipknot serait devenu une sorte de side-project, comme l'avait été Stone Sour par un temps. C'est pas gênant si la qualité prime sur la quantité, s'il n'y a pas de besoin de clamer au monde "Regardez, on est encore là tous les deux ans malgré tout". Si Slipknot continue à sortir ce genre d'album tous les 4 à 5 ans, y'a pas de problème !

Cet album marque aussi l'avènement de Corey Taylor comme l'un des chanteurs du metal les plus polyvalents et les plus puissants vocalement parlant. Même si cela était acté depuis pas mal de temps, on a l'impression qu'il a encore repoussé les limites de son talent. Même si les changements sont moins marqués que dans All Hope is Gone (et notamment Psychosocial, même si faire plus puissant et plus contrasté que ce morceau risque d'être terriblement compliqué). C'est un peu le cas dans AOV, avec des refrains en scream alors que les couplets sont en chant clair.

Les contrastes internes à l'album sont donc assez saisissants. Slipknot fait taire les rumeurs comme quoi il serait en perte de vitesse, voire même sévèrement amoché suite à la mort de Paul Gray et au départ de Jordison. Un tournant s'est clairement opéré, et même si c'est évident à dire, le groupe ne sera plus jamais dans les mêmes dispositions pour créer de la musique. La production de cet album est quasiment parfaite, et le duo basse-batterie assure à plein régime. Alors que c'était loin d'être évident.